Entretien avec Alain Clément de No Return au Black Dog à Paris
Interview avec Alain Clément, guitariste du groupe No Return à l’occasion de la journée promotion organisée par Roger de Replica Promotion, au Black Dog à Paris
Nouvel album « Requiem » qui est sorti le 21 octobre 2022 chez Mighty Music.
Artwork designed by atelier primitive.
TRACKLIST
The Only One 5:13
Killing Machines 4:27
Affliction 4:07
No Apologies 3:22
Nobody Cares About You 4:30
Unscarred 4:21
Survival Instinct 4:06
Lies 4:52
The Podium Of Truths 5:02
The Black Wolfs Kingdom 6:38
Line-up de gauche à droite
Geoffroy Lebon : Guitars / Alain Clément : Guitars / David Barbosa : Bass
Steeve Petit : Vocals / Joël Barbosa : Drums
Alain est le seul membre originel de No Return après 33 ans d’existence du groupe.
https://noreturnarmy.bandcamp.com/
https://www.facebook.com/NoReturnMetal/
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Rock Metal Mag : Après le départ de Mick Caesare, le retour de Steeve Petit au chant en 2020 était une évidence pour le groupe?
Alain : Alors non, ce n’était pas spécialement une évidence. Mais lorsque nous avons passé l’annonce pour rechercher un nouveau chanteur, Steeve nous a contacté dès le début. C’est vrai que j’étais surpris au départ puisque cela faisait 20 ans. Et donc, il m’a dit qu’il n’avait pas finalisé l’histoire avec No Return. Du coup, on s’est rencontré pour en discuter. Il était important de voir ce qu’il était possible de faire ou pas.
On a donc beaucoup parlé afin de pouvoir faire un album qui corresponde aux goûts de chacun. Comme je connaissais les qualités de Steeve, je n’avais pas de soucis au niveau artistique. Il fallait surtout se mettre d’accord sur la direction à prendre pour l’album, savoir ce que l’on voulait faire musicalement et le reste. Donc, cela s’est passé assez rapidement puisque je sais ce qu’il est capable de faire et c’est beaucoup plus facile. Et puis nous étions d’accord sur les modalités pour faire un nouvel album et essayer vraiment de faire le mieux possible.
Le but était de faire un album qui corresponde à nos envies artistiques.
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Rock Metal Mag : En 2019 vous avez fêté les 30 ans de carrière de No Return et en décembre 2020 vous avez sorti Live XXX votre 1er album live. Donc en pleine période de Covid. Est ce que cela a eu un impact important sur cette sortie ?
Alain : Et oui il y a eu forcément un impact. Sur l’année 2019 on a fait une tournée pour les 30 ans de No Return . Et on voulait vraiment sortir un live surtout que les fans nous le demandaient. Mais on attendait aussi le bon moment. Il fallait un lieu qui s’y prête pour à la fois filmer et enregistrer avec un son correct.
Du coup on l’a sorti en 2020 et il y avait la pandémie.
Mais on ne pouvait pas reculer éternellement cet enregistrement. Et il est donc sorti pendant cette pandémie avec comme impact le fait que l’on a pas pu jouer pendant deux ans. Mais cela reste un témoignage chronologique de la carrière de No Return. Le Set s’est déroulé de manière à ce que l’on ait des morceaux de chaque album, en partant du début du groupe, jusqu’à l’album studio The Curse Within (2017).
Pour nous, il était intéressant de proposer ça aux personnes qui nous suivent depuis longtemps ainsi qu’aux nouveaux fans qui voulaient un panel de la carrière de No Return.
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Rock Metal Mag : Est ce que la composition de Requiem a commencé justement pendant cette période de Covid et de ses confinements ?
Alain : Oui, puisque pendant la pandémie nous n’avions plus d’activité scénique. On s’est donc concentré sur la composition de l’album et on a peaufiné les structures. On a pu prendre plus de temps aussi puisque l’album devait, bien sur, sortir plus tôt. Mais comme la pandémie était très incertaine on a préféré attendre qu’elle puisse s’évacuer progressivement. Surtout pour avoir aussi plus de chance de défendre cet album en live. Parce que sortir un album et ne pas pouvoir en faire sa promotion live c’est tout de même rageant.
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Rock Metal Mag : Est ce que cela a modifié votre processus de composition?
Alain : Alors souvent on travaille par échange de fichiers à distance parce que nous sommes un peu éparpillés. Donc cela n’a pas tellement changé par rapport aux autres albums. La problématique pendant la pandémie était plus de se voir pour essayer des choses en répét et voir comment cela sonnait. Parce que les échanges de fichiers, c’est effectivement une bonne base de travail, mais cela ne remplace jamais l’impact des 5 personnes qui jouent en même temps dans la même salle.
C’est aussi pour ça qu’au niveau de la composition, cela a été plus long.
C’est vrai que pendant les différents confinements on ne pouvait pas trop bouger. En plus nous sommes assez éloignés et il y avait des restrictions en terme de kms. Donc, quand on avait l’occasion de se retrouver, on essayait d’utiliser le temps, le plus possible. Entre deux confinements on arrivait à répéter mais cela restait assez compliqué.
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Rock Metal Mag : Est ce que depuis l’arrivée de Geoffroy Lebon en 2016, vous composez ensemble les riffs de base ?
Alain : Alors oui, les riffs sont souvent composés à deux. C’est vrai que c’est un travail de guitaristes au départ. On compose des morceaux avec une certaine structure et ensuite on les propose aux autres membres du groupe. Donc, avec des échanges par internet. Après on dialogue beaucoup et on voit ce qui peut être changé ou non. Ensuite on finalise le tout en répéts avec les structures, les tempos et tout le reste.
Donc à la base, ce sont bien les deux gratteux qui composent la musique de No Return et ensuite Steeve pose ses chants dessus.
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Rock Metal Mag : Les guitares ont toujours une belle place dans l’album comme toujours d’ailleurs.
Alain : C’est un peu une caractéristique de No Return. On accorde effectivement depuis le début, une place importante aux guitares. Et l’évolution musicale du groupe a toujours été dans ce sens là. Au niveau de la mélodie aussi. Je trouve qu’il y a beaucoup de groupes aujourd’hui où il n’y a plus vraiment de solos. C’est souvent rythmique. Donc, on est encore attaché à ce style où les guitares tiennent une place importante. Et on fait tous les deux des solos sur des parties que l’on se partage. Mais sans avoir de règles préconçues. Le but ce n’est pas d’en mettre partout. Il faut que les solos et les mélodies servent la musique du groupe.
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Rock Metal Mag : C’est Steeve Petit qui écrit les textes? Quand on voit les titres de Requiem, on imagine une thématique en rapport avec tous les problèmes liés à notre société actuelle?
Alain : Oui, tout à fait. Les problèmes liés à la société sont toujours d’actualité, et puis les problèmes psychologiques des personnes aussi. Les textes parlent de plusieurs choses comme par exemple des avancées technologiques, qui peuvent être positives ou négatives. L’addiction aux écrans par exemples, par rapport à la nouvelle génération. Elle passe énormément de temps sur les smartphones et autres écrans. Après il y a toujours les problèmes religieux, politiques, mais sans porter de messages.
C’est simplement un constat pour dire que malheureusement au fil du temps il y a les mêmes thèmes récurrents. La religion, le non investissement au niveau politique, les mensonges, la désocialisation qui fait que les gens sont de plus en plus individualistes.
Donc, tous ces thèmes se prêtent bien à la musique que l’on fait et qui est assez énergique. Sans pour autant être des messages ce sont de simples constats. Un reflet de notre société.
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Rock Metal Mag : D’où le titre Requiem. C’est une prière pour un monde meilleur?
Alain : Oui. L’idée est que finalement, l’homme avec ses contradictions, « ses vices et ses travers », conduit globalement à un certain pessimisme, par rapport à la société. Alors tout n’est bien sur pas noir mais quand on regarde finalement ce qui se passe actuellement.. Moi, personnellement je ne regarde plus les infos sinon c’est la déprime.
Alors le titre Requiem, c’est par rapport à cette société qui n’est pas très top et qui n’évolue pas de la meilleure façon. Heureusement que l’on a la musique qui nous aide à nous évader. C’est un exutoire comme le sport d’ailleurs. Cela nous aide à penser à autre chose pour continuer d’avancer.
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Rock Metal Mag : Est ce que vous avez à nouveau travaillé au studio de Jacob Hansen au Danemark, comme pour “The Curse Within“ ?
Alain : Alors non, pas du tout. Initialement, on aurait voulu faire un 3ème album studio avec Jacob Hansen avec qui on a fait les deux précédents. Mais avec la pandémie, c’était difficile d’aller enregistre au Danemark. Du coup, on a enregistré avec Olive, notre ingé son live qui nous suit depuis plusieurs années. Il a fait plusieurs tournées avec nous, il connaît vraiment le groupe et il bosse super bien. Donc c’était le moment de lui confier un album studio et franchement, il a fait un super boulot. Pour nous c’est une belle satisfaction car c’est aussi un membre de No Return.
Alors on a enregistré batterie et basse chez lui et on a fait les guitares chez nous. Steeve a également enregistré sa voix chez lui. Ensuite, Olive a mixé et masterisé le tout.
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Rock Metal Mag : La pochette de Requiem est semblable à celle de Self Mutilation (2000) et Machinery (2002). Et sur ces deux albums Steeve Petit était justement présent. C’est volontaire?
Alain : Oui c’est tout à fait volontaire. En fait la pochette a une double signification. C’est un petit clin d’ail aux pochettes des albums où Steeve était là. Et les gens qui connaissent No Return voient directement le truc. Et en plus c’est l’évolution de la pochette Machinery. Mais avec cette femme un peu cyborg, c’est surtout pour montrer les avancées technologiques de la société. Donc pas avec un coté positif, puisque même si la technologie c’est bien, elle est parfois mal utilisée. Voilà, c’est faire un peu faire réfléchir les gens sur l’utilisation de cette technologie dans notre société et sur ses conséquences. Il y a bien sur la désocialisation mais pas que. Je pense bien sur aux voitures électriques. On nous dit que c’est écologiques mais les batteries ne le sont pas du tout.
Donc la pochette montre vraiment que l’on veut évoluer technologiquement mais avec une nana pas très clean pour dire aussi attention à ce que l’homme fait avec cette technologie.
Rock Metal Mag : Souvent se sont des mensonges détournés.
Alain : Oui complètement et quand on creuse, souvent le coté négatif est caché volontairement, la plupart du temps. Et en ce qui concerne la technologie par rapport aux écrans, cela devient vraiment un phénomène social. Les gens deviennent de plus en plus individualistes. Certains ne vont même plus aux concerts et ils les regardent sur Youtube, avec un mauvais son. Alors, je suis peut être trop vieux, mais pour moi, un concert cela se vit live. Sur Youtube tu ne peux pas ressentir la même chose.
Rock Metal Mag : Comme les personnes qui regardent un concert à travers leur téléphone alors que le groupe est sur scène devant eux !
Alain : Oui, on a vu évoluer ça depuis des années. Alors bien sur, qu’ils prennent des photos avec leur smartphone c’est cool. Mais quand le groupe est devant et qu’ils continuent de regarder avec le smartphone, il y a quand même un problème. Ils ne profitent pas vraiment du concert. Donc je trouve ça dommage.
Rock Metal Mag : les jeunes ne vivent plus du tout les concerts comme nous avons pu le faire.
Alain : Ce n’est plus du tout la même génération et ils n’écoutent plus la musique de la même façon. Ils vont l’écouter sur leur téléphone avec un son pourri mais ils s’en foutent finalement. C’est leur façon d’écouter de la musique et ce n’est pas très qualitatif. Mais on ne peut pas leur en vouloir puisque finalement ils sont nés comme ça. Mais c’est dommage d’appréhender la musique avec aussi peu de qualité sonore.
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Rock Metal Mag : Vous avez conservé votre style Death/ Thrash, brutal et mélodique avec des guitares très heavy et je trouve que certaines chansons sont plus épiques comme sur Apologies et je dirais qu’il y a une progression dans l’album vers un coté très Brutal Death à la fin.
Alain : Alors effectivement, on voulait vraiment, sur cet album, proposer toute la palette de No Return, à la fois mélodique, heavy, thrash, death. Et justement que l’auditeur sente qu’il y a une succession de morceaux mais sans linéarité. Avec la pate No Return dont la base est quand même Thrash metal, mais aussi la mélodie des guitares et surtout les ambiances.
Tu parlais du morceau Apologies et au milieu on a fait une plage assez aérée. A la limite on pourrait trouver ça dans un groupe de prog. Mais c’est important pour nous de proposer plusieurs ambiances. Et même pour l’auditeur, si c’est trop linéaire, je pense qu’il peut s’ennuyer. Un album où tout les morceaux se ressemblent est sans relief.
Donc sur cet album, on a une variété plus importante par rapport à ce que l’on avait fait auparavant. Les retours que l’on a disent bien qu’il est varié dans sa continuité.
Rock Metal Mag : Sur la fin on sent des influences dans la veine de Cannibal Corpse, Dying Fetus et ce genre de groupes. Et puis aussi Metallica, qui je présume est une de vos influences.
Alain : Ah Oui, bien sur. Pour nous le Thrash metal de la Bay Area a été vraiment notre source originale avec Slayer, Testament, Metallica, Exodus. Note premier album est typiquement Thrash metal. C’est vraiment notre base et on le revendique encore actuellement. Et cela se ressent encore sur Requiem. C’est très important de garder cet esprit qui est la base de No Return.
C’est sur qu’après on a évolué en tant que musiciens et on s’est ouvert à plein d’autres styles. Mais les gens aiment bien coller des étiquettes. Moi, à la limite, je m’en fiche et je joue ce qui me plait. Je peux très bien jouer du Hard Rock des années 80/90, que j’adore, comme Whitesnake, Lynch Mob, Ski Row. Et je pense que cela se ressent aussi sur cet album.
Rock Metal Mag : Et chaque musicien a ses propres influences.
Alain : Oui on écoute tous pas mal de styles différents. De toutes les façons quand tu es musicien tu ne peux pas te contenter d’un seul style si tu veux évoluer. Même à coté, si tu ne le fais pas dans ton groupe, pour progresser et simplement se faire plaisir. Ce qui est important c’est que l’on garde une certaine cohérence pour que les gens reconnaissent No Return.
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Rock Metal Mag : Vous avez sorti la vidéo de « The Only One » en juillet dernier est ce que vous préparez un nouveau clip?
Alain : Alors on va effectivement proposer dans les semaines qui viennent, un nouveau single pour appuyer encore l’album. Je pense que c’est important de pouvoir proposer, par le biais du Net, des titres de manière internationale. Après bien sur, l’album est sur Youtube depuis longtemps et il est déjà sorti. C’est la règle maintenant, donc la personne qui veut écouter l’album peut le faire sur Youtube. Mais c’est toujours bien de représenter un morceau dans les semaines et les mois qui suivent la sortie d’un album.
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Rock Metal Mag : The Only One était donc le premier titre de l’album. Est ce que l’ordre de la tracklist est important et donc le suivant sera Killing Machines?
Alain : Oui je pense que l’ordre est important. Il n’y a pas de tracklist idéale mais on voulait justement proposer une variation également au niveau de l’écoute . The Only One montre vraiment No Return en 2022 avec tout ce que l’on sait faire avec ce mélange Heavy/Death Black. Il y a des blast beats sur le refrain, il y a le coté Thrash et le solo heavy qui est assez musical. Il y a aussi des samples que l’on aime bien incorporer pour créer des ambiances. Après on enchaîne avec Killing Machines qui est beaucoup plus Thrash et où on rvient aux racines de No Return. Mais Thrash résolument moderne à la dois avec le son et la composition.
Donc la tracklisting était importante pour justement montrer les différentes facettes du groupe. Et donc, pour le prochain clip, on aimerait bien le faire sur Killing Machines ou Unscarred qui sont des références un peu plus Thrash Metal. Donc montrer que nos racines Thrash sont toujours là. La plupart des chroniques font référence à Testament pour le titre Killing Machines. Je pense qu’il est important de choisir plusieurs titres différents et de sortir des singles pour montrer toute la palette du groupe.
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Rock Metal Mag : Vous avec du avoir beaucoup de retour depuis la sortie de Requiem et avez vous eu des critiques sur le changement de chanteur?
Alain : Alors on a eu aucune critiques à ce niveau là et les chroniques en France et à l’étranger sont plutôt positives. Donc ça c’est cool.
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Rock Metal Mag : Est ce que vous avez des dates à annoncer pour la fin de l’année ou vous êtes plus sur le planning de 2023 ?
Alain : Alors on a fait une date dans un festival au Forum de Falaise ( ndlr: Calvados), la semaine dernière ( ndlr: 12 novembre, Conquerant Metal Fest ). Donc on a commencé à présenter nos morceaux mais le reste des dates sera en 2023.
Après c’est un peu compliqué et il y a un embouteillage en ce moment. A cause de la pandémie, il y a eu forcément des reports de tournées et maintenant il y a vraiment un entonnoir. Les salles sont saturées puisque tout le monde veut jouer. Et ça je le comprends mais il y a à la fois, les groupes qui ont reporté leur tournée et il y a tous les autres groupes qui sortent un album et qui veulent jouer. Voilà, donc on va faire le maximum en 2023. On a déjà des dates en février mais on va essayer d’en faire le plus possible. Mais c’est vrai qu’il y a un réel problème.
Et je dirais aussi en terme d’affluence d’après les organisateurs. Les gens ont du mal à revenir. Je pensais que ce serait l’inverse, mais finalement après la pandémie et le manque de concerts, on s’aperçoit que les gens sont un peu frileux. Il y a même des festivals qui ont été annulés parce qu’il n’y avait pas assez de préventes. Maintenant les organisateurs sont très attentifs aux préventes. Donc il y a aussi un vrai problème avec cette réticence des gens à revenir en concert.
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Rock Metal Mag : Je te laisse le mot de la fin.
Alain : Ecoutez le dernier album et venez nous voir en concert et ce sera super.