JOHNNY DEATHSHADOW – Album D.R.E.A.M.

JOHNNY DEATHSHADOW – Album D.R.E.A.M.

Chronique : JOHNNY DEATHSHADOW – Album D.R.E.A.M. (sorti le 18 janvier 2019) par Véronique Passos

Chronique : JOHNNY DEATHSHADOW – Album D.R.E.A.M. par Véronique Passos

JOHNNY DEATHSHADOW – Album D.R.E.A.M.

Genre: Gothique, Metal Industriel 

Sortie 18 janvier 2019

Origine Hambourg/Allemagne
Label: Make Big Records / Belive Digital / Soulfood

Références musicales : AFI, Bring Me The Horizon, Combichrist, Ministry…

JOHNNY L’OMBRE DE LA MORT ou les nouveaux cavaliers de l’apocalypse.

Avec JOHNNY DEATHSHADOW cela n’a pas été le coup de foudre mais plutôt une lente histoire de séduction. Les groupes masqués ou maquillés n’attirent pas mon attention facilement car j’ai besoin d’un contact visuel pour savoir qui me parle. Cependant, j’aimais leur son et je les gardais au chaud dans un coin de mon esprit.

La rencontre inévitable s’est produite à l’occasion de leur venue en France en novembre dernier puisqu’ils accompagnaient mes hanovriens préférés, Unzucht. Je les ai revus ensuite en Allemagne à Francfort en décembre. Leurs prestations live ont fait tomber toutes mes réserves et c’est avec une curiosité joyeuse que j’ai accueilli la sortie de leur nouvel album D.R.E.A.M.

Fondé depuis dix ans, JOHNNY DEATHSHADOW vient du Horror Punk comme en témoigne leur premier EP BLOOD & BONES notamment avec le titre « The Night of the Living Dead ». Depuis, leur style a progressivement évolué vers un metal gothique industriel teinté d’électronique. Les thèmes de leurs compositions sont objectivement sombres et corrosifs. Progressivement, leurs personnages scéniques se sont affirmés à travers leur maquillage spectral ce qui imprime à leur présence une épaisseur impressionnante.

Il y a des groupes que le succès paralyse mais il semble que pour JD ce soit l’inverse ; plus ils croient en eux et en leur capacité à exister sur la scène rock allemande et plus ils se libèrent et imposent leur identité. D’évidence, le groupe n’a pas seulement travaillé sur son apparence mais de leur propre aveu ils ont apporté un soin tout particulier à la composition et à la production avec un souci grandissant de sens, de complexité et de profondeur.

JOHNNY DEATHSHADOW partage avec Unzucht la particularité d’avoir deux chanteurs aux registres complémentaires et cette formule me plait énormément, je le confesse. Le chanteur attitré et fondateur du groupe Jonathan Schneider utilise sa voix claire ou gutturale tandis que Eike Cramer qui est aussi le guitariste et second fondateur chante dans un style « britpop » admirable. La voix de Jonathan par son absence de sophistication est touchante et j’adore la rage qu’elle véhicule, son accord avec celle d’Eike est un des points forts du combo.

JOHNNY DEATHSHADOW a déjà un EP BLOOD & BONES et un premier album BLEED WITH ME à son actif. Comme pour BLEED WITH ME, c’est à nouveau Alex Henke (Boogie Park Studios) qui est le producteur du nouvel opus des Hambourgeois. Je rassure les irréductibles réfractaires à la si belle langue allemande, JD a choisi la langue anglaise pour ses textes d’une ténébreuse beauté.

La pochette de l’album en noir et blanc est assez énigmatique, on y voit un cavalier portant un masque à gaz et une lance, elle envoie un message de protection et de résistance mais ce n’est que mon interprétation. D.R.E.A.M. propose douze titres qui laissent apparaître deux versants du même album.

Le plus directement accessible devrait capter les nouveaux auditeurs de JD et va du premier au sixième morceau. Cette partie débute avec « Red Rain » une chanson « cri » irrésistible avec ses chœurs qui n’atténuent qu’à peine sa dureté. « Trauma », premier single de l’album, est tout bonnement tubesque même si sa mélodie entêtante contraste avec son thème. Le troisième titre « Legion » se voit renforcé au chant par Dominic Christoph de Cypecore, morceau assez atypique mais d’une efficacité redoutable, il faut saluer ici la basse puissante de Daniel Meier alias Don Daniel. « Sugar Like Salt » rapide, dansante, est étourdissante et superbement produite. Et l’on arrive à « Embers » que j’aime sans modération depuis que je l’ai entendu en concert « embers, touched by the fire we are cursed we get what we deserve » déchirant, apocalyptique !

« Black Fire Below », en guise de transition entre les deux versants, est assez indéfinissable comme si elle n’avait pas été complètement développée, dommage. Imperceptiblement, « The Silent Language of Grief » insuffle le changement de climat. La composition se fait plus complexe, plus grave, quelque chose d’inéluctable est en marche. Avec « The Witness » D.R.E.A.M. plonge dans la peur et la nuit, la musique comme une course à faire exploser les poumons.

La neuvième chanson « From on High » nous conduit de la peur à l’angoisse, cachés dans le noir, nous entendons nos dents s’entrechoquer, des voix oppressantes, des sons métalliques et froids… JOHNNY DEATHSHADOW, fournisseur musical officiel de nos cauchemars. Et ce n’est pas « Under His Eye » qui va nous sauver ! Nous sommes maudits, abandonnés à notre sort funeste et ce sont ces riffs chargés de désespoir qui nous le révèlent, appuyés par des voix dont plus aucune lumière ne s’échappe. « Suicide Boys Club », quelle vaine insouciance de headbanger lourdement sur ce rythme alors que la folie nous guette et que la main du diable nous agrippe « run, run, run… » sans doute le plus somptueux titre de l’album !

La conclusion arrive déjà avec une ballade « Beyond The Pale », alternant minimalisme et envolées dramatiques, chantée comme au bord du précipice, à bout de souffle… pouvons-nous encore nous sauver de la tragédie qui se profile ?

Tels les quatre cavaliers de l’apocalypse annonçant les événements de la fin des temps, JOHNNY DEATHSHADOW décrit au travers de chansons visionnaires les dangers qui nous menacent. Ils le font avec un brin de provocation mais les plus lucidement sévères et les plus désespérés ne sont-ils pas les plus aimants ?

Cet album diablement efficace est une marche supplémentaire pour JOHNNY DEATHSHADOW vers la reconnaissance et les groupes avec qui ils ont tourné, Die Krupps, Unzucht et prochainement Hell Boulevard ne s’y trompent pas. Il parait que l’un de leurs rêves est de jouer un jour au Hellfest en France… c’est tout le mal que nous leur souhaitons !

Curieusement, malgré la dureté de leur univers et de leur imaginaire macabre, leur musique me réconforte et éveille en moi un sentiment de fraternité. Ces JOHNNY-là me font bien plus de bien que de mal.

Tracklist :

01 Red Rain
02 Trauma
03 Legion
04 Sugar like Salt
05 Embers
06 Black Fire Below
07 The Silent Language
08 The Witness
09 From On High
10 Under his Eyes
11 Suicide Boy Club
12 Beyond the Pale


Line up :

Jonathan Schneider chant,

Eike Cramer guitare et chant,
Daniel Meier basse,

Sascha Meier batterie.