Interview du groupe Seeds Of Mary

Interview du groupe Seeds Of Mary

Jéremy, Julien, Raph et Aron du groupe Seeds Of Mary ont répondu à quelques questions à propos de leur second album Serendipity

Le groupe bordelais Seeds Of Mary a sorti son nouvel album “Serendipity” via KLONOSPHERE/Season of Mist le 25 septembre 2020 .
Jéremy, Julien, Raph et Aron ont répondu à quelques questions .

Seeds Of Mary

Jéremy Dourneau : Chant
Julien Jolivet : Guitares, programmation
Raph Gatuingt : Guitares, chant
Eliott Le Soleur : Basse
Aron Silvestre : Batterie

TRACKLIST

01. The Atheist
02. Rewind Me
03. Not Where I Belong
04. Bleed Me Dry
05. Reinventing You
06. Chameleonic
07. Gone Astray
08. Sanity is Statistical
09. From The Void
10. Somewhere Between Me & Myself

Pour commander l’album : http://www.klonosphere.com/

BANDCAMP

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Rock Metal Mag : « Serendipity » est sorti le 25 septembre , soit 3 ans après “The Blackbird and The Dying Sun” paru en octobre 2017. Quand avez vous commencé la composition de l’album ?

Julien : Les premières démos ont été enregistrées début 2018. La première fût Chameleonic, suivie de Bleed Me Dry et Rewind Me qui ont toutes trois été écrites dans la même période. Puis nous nous sommes concentrés sur l’enregistrement de l’EP The Sun Sessions pour revenir aux compos de Serendipity par la suite. C’est un travail de longue haleine en général.

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Rock Metal Mag : Est ce que le confinement vous a posé des problèmes pour l’enregistrement et a retardé la sortie ?

Raph : A ce niveau là, je dois dire que l’on a été plutôt chanceux. Le confinement a été annoncé alors que le travail était déjà bien avancé. On a bouclé les prises de chant une petite semaine avant que l’enfer de 2020 ne commence. (rires) Le petit regret étant que nous aurions adoré faire appel à notre ami Quentin Gendrot pour enregistrer quelques parties de violoncelle. Et éventuellement s’entourer de quelques autres instrumentistes pour certains arrangements, mais les choses n’ont pas pu se faire comme on l’aurait souhaité. On a du faire des concessions et trouver des solutions. Ce n’est que partie remise, évidemment!

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Rock Metal Mag : Coté composition, est ce que c’est toujours Julien qui amène le riff de départ ou bien, à présent votre processus a changé ?

Julien : Alors cela n’a pas grandement changé sur ce point-là. Je continue d’emmener des morceaux en partie structurés et arrangés. Mais pour Serendipity, Raph a également proposé deux idées de compos : Not Where I Belong et Reinventing You. De plus, tout le monde s’est beaucoup plus investi dans le travail de préprod pour affiner la cohérence globale.

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Rock Metal Mag : On sent qu’il y a eu un gros travail sur Serendipity qui foisonne de détails sonores et libère beaucoup d’émotions. Quel a été votre plus gros challenge pour ce troisième album?

Raph : Je n’ai pas l’impression que le groupe ait eu, à proprement parler, à relever de challenge lors de l’écriture de l’album. Le processus de composition s’est fait de manière très naturelle, nous avons simplement écrit des morceaux, réalisé un gros travail de pré-production en amont, réarrangé à notre convenance et enregistré le tout plusieurs mois après.

C’est comme cela que nous procédons à chaque fois. Par contre, pour notre troisième album, nous voulions mettre les petits plats dans les grands en essayant de nous renouveler.. Personne au sein du groupe n’a envie de faire le même album deux fois, ce n’est pas notre façon de voir les choses. Notre objectif premier était donc de maintenir une réelle cohérence tout en apportant de nouvelles sonorités. Mais encore une fois, cela s’est fait sans pression, et c’est une bonne chose. Nous sommes restés nous-même tout en essayant de repousser nos limites!

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Rock Metal Mag : La sérendipité, est en quelque sorte liée au hasard , comme le fait de trouver une chose alors que l’on en cherchait une autre, pourquoi avoir intitulé votre album Serendipity ?

Julien : J’ai toujours été attiré par ce concept bien connu dans l’histoire de la littérature. Je trouvais pertinent de le proposer pour un titre d’album. En effet, une œuvre d’art pensée et interprétée à plusieurs mains n’est elle pas obligatoirement un acte de sérendipité ?

Cela est finalement venu assez naturellement dans la période que le groupe traversait. Comme toujours, nous avions tous une idée en tête pour cet album mais nous avons tous accepté que le résultat transcenderait nos attentes individuelles pour donner quelque chose d’inattendu par définition. Et puis l’idée d’entendre le nom de cet album être écorché dans chaque interview nous plaisait plutôt bien. Nous sommes taquins dans Seeds !

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Rock Metal Mag : Quels sont les principaux thèmes abordés dans les textes ?

Jérem : Le concept de sérendipité servait de porte d’entrée à plusieurs thématiques assez intéressantes. La vie elle-même est affaire de sérendipité, avec tous les hasards et les contraintes qu’elle sous-tend. Et cette idée permettait d’aborder des thèmes comme la remise en question, le patrimoine spirituel, le cheminement personnel, la création, l’adaptabilité à l’environnement.  Et ils débouchent sur des sujets comme le deuil, la maladie, le chaos inhérent à l’être humain…

Ce sont des choses qui peuvent donc sembler assez sombres.  Et pour nous,  il s’agit d’explorer des sujets qui nous préoccupent, tout en essayant de trouver nos propres réponses. Finalement, il s’agit plus de partager nos propres questionnements plutôt que d’essayer d’apporter des réponses. Personnellement c’est ce qui me plaît le plus en tant que spectateur quand je suis confronté à une œuvre, quel que soit son support.. Et malgré tout, certains morceaux, comme From The Void ou Somewhere Between Me and Myself, comportent tout de même une lueur d’espoir.

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Rock Metal Mag : Vous avez dévoilé en premier titre The Atheist, très émotionnel et en même temps plein de rage dans le chant.  L’Athéisme est un sujet important pour vous ?

Julien : Je répondrais en mon nom propre.  Je ne souhaite pas faire porter aux autres des propos personnels qui ne seraient pas forcément partagés par le reste du groupe. D’ailleurs je ne les remercierai jamais assez de me laisser une si grande liberté artistique. Elle me donne la joie de pouvoir exprimer tout un tas de choses, parfois très personnelles, sans me sentir censuré ou frustré.

Nos albums se nourrissent toujours d’expériences personnelles, de constats, de réflexions, d’œuvres digérées, etc. Pour le cas de The Atheist, le morceau est né lors d’une préparation à un deuil imminent qui, je le savais, me laisserait sur le carreau émotionnel. Ce rapport au deuil et à l’absence de raison métaphysique était finalement la continuité d’une réflexion personnelle entamée il y a déjà longtemps.

Sans faire de prosélytisme ou de militantisme idéologique, il me paraît sain de se servir de l’art pour édicter certaines valeurs sur lesquelles notre œuvre se construit. L’athéisme peut en faire partie. De plus, c’est peut être indirectement une manière de se distancer de toute cette tendance esthétique un peu « facile » dans laquelle le Metal aime à se complaire aujourd’hui. Toutes ces œuvres se veulent ésotériques et mystiques.  Cette vision faussement élitiste de l’œuvre d’art qui se voudrait extrêmement profonde et inaccessible au quidam, me laisse souvent perplexe. Elle m’évoque au contraire une grande naïveté.

Par dessus cela, s’ajoute toute la kitscherie satanique du Metal qui montre finalement une incapacité à dépasser tout le délire judéo-chrétien dans lequel tous ces gens-là s’enferment. Et l’affirmation de l’athéisme peut être une façon plus simple de se démarquer de tout ce beau monde.

Est-ce donc un sujet important ? Pas plus que les autres, mais il fait partie d’un système de pensée et d’une esthétique qui fixe le cap depuis le début du groupe. Choose Your Lie sorti en 2013 le dit déjà en filigrane…

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Rock Metal Mag : Est ce que le choix de l’artwork est lié à la chanson Chameleonic ?

Julien : En partie oui ! C’est un morceau important de l’album qui a évidemment influencé le choix de la pochette. Elle fédère des thèmes récurrents du disque : la sérendipité, le regard, l’œuvre d’art, la découverte, la place que l’on occupe par rapport à soi-même et son environnement, etc. Bref, elle s’est imposée comme une évidence.

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Rock Metal Mag : Vous montrez de nouveaux aspects du groupe sur cet album, avec un coté moins grunge et plus rock avec des touches atmosphériques sur « The Atheist » et  même pop avec « Rewind Me » c’est une volonté de votre part ou c’est le fait du hasard, de la Serendipité?

Julien : Je crois que nous nous mettons de moins en moins de barrière. Cela commence déjà par décoller toutes les étiquettes qui nous limiteraient dans notre expression artistique. Grunge est un genre que l’on peut revendiquer sans aucun problème mais ce serait tellement réducteur…

Nous avons juste fait le disque que nous aimerions entendre avec ses qualités et ses défauts. Nous avons fait preuve d’un plus grand lâcher prise et d’une plus grande confiance entre nous.
Et puis, pour ce qui est des éléments atmosphériques et pop, c’est qu’ils servaient le propos. Et tant que cela sert l’œuvre et que le résultat garde sa cohésion, nous ne nous interdisons rien.

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Rock Metal Mag : Il y a également de brèves parties de chant screamé comme en ouverture de The Atheist,  ou sur Not Where I Belong avec aussi du chant slamé c’est une nouvelle direction que vous allez poursuivre dans vos prochaines compositions ?

Jérem : Ce genre d’idées naissent vraiment en fonction des pistes instrumentales, rien n’est calculé ou réellement pensé en amont, et les pistes chant sont vraiment inspirées par les pièces musicales. Mais par contre, c’est effectivement très plaisant de toucher de nouvelles choses, et dans la mesure où nous ne nous interdisons rien, c’est toujours intéressant d’ouvrir de nouvelles portes créatives.

Il est possible qu’il y ait plus de chant screamé dans de futurs albums en effet, cela nous plairait assez de développer l’aspect métal de notre musique. Mais encore une fois, l’avenir et les futures compositions avéreront ou démentiront mes propos.

Si ça se trouve, notre prochain album sera totalement acoustique, ou totalement pop, ou beaucoup plus violent… Nous suivrons les humeurs du moment, en faisant de notre mieux pour essayer de proposer des nouvelles choses à tous les niveaux, sans nous fixer d’objectifs ultra-précis.

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Rock Metal Mag : Pour le chant et la superbe voix de Jéremy est ce qu’on lui a déjà dit qu’il avait des intonations à la Zakk Wylde (sur le dernier titre en particulier plus que sur les autres) ?

Jérem : Tout d’abord, merci beaucoup pour le compliment ! Il me semble qu’on me l’a déjà dit au moins une fois oui. Je t’avoue que ce n’est pas vraiment une influence pour moi, mais c’est toujours agréable d’être rattaché à ce genre de figure. Me reste plus qu’à cravacher comme un malade pour gagner autant que lui ! (rire)

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Rock Metal Mag : Chameleonic et From the Void ont une couleur plus prog, c’est un style qui vous influence également ?

Raph : Oui, j’ai en effet la sensation que le prog prend une place de plus en plus importante dans nos compositions, d’une part parce que c’est un style techniquement et musicalement hyper intéressant et également parce qu’il s’affranchit justement de pas mal de conventions musicales.

J’ai personnellement la sensation de trouver dans ce style la diversité que je recherche la plupart du temps. A l’instar de mecs comme Thank You Scientist, combien de groupes peuvent se targuer de mélanger autant de styles de manière aussi créative et cohérente ? Le seul risque avec le prog, ce serait d’en faire un style un peu « fourre-tout ».

Je n’imagine vraiment pas Seeds Of Mary devenir un groupe de prog, je préfère l’option d’en incorporer quelques touches à nos morceaux, comme le font Katatonia, par exemple, qui est un de mes groupes favoris.

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Rock Metal Mag : Pourquoi avoir choisi de clipper cette chanson Rewind Me plutôt qu’une autre ?

Raph : Lors de la composition des morceaux, on a tout de suite su que Rewind Me serait le single principal de l’album, de par son format et ses sonorités. C’est un morceau assez court et efficace, avec un refrain très axé sur la mélodie, mais avec un pont somme toute peu conventionnel, que ce soit rythmiquement ou harmoniquement.

Nous sommes très fiers d’avoir pu mettre en avant un morceau avec un tel aspect « tubesque » tout en saupoudrant le tout d’éléments un peu inattendus. Du coup, honnêtement, la question ne s’est pas vraiment posée quand il fallu se décider sur le premier clip à tourner. Le choix nous a semblé évident et Klonosphere était largement d’accord avec cette idée.

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Rock Metal Mag : Quelle était votre idée de base pour le choix du titre Rewind Me et cette projection de peinture violette ?

Jérem : Le fait d’utiliser Rewind Me comme un de nos premiers singles nous a tout de suite effleuré, car c’est certainement le morceau le plus catchy de l’album, et son format court lui donne un côté tube assez immédiat. J’avais écrit un clip beaucoup plus scénarisé et compliqué à mettre en place, et aussi plus raccord avec ce que raconte le morceau, et en aurait permis une lecture un peu plus claire.

Mais en discutant avec Thomas Duphil, le réalisateur avec qui nous travaillons maintenant depuis plusieurs années, cela semblait très compliqué à réaliser.  Et d’autant plus avec le confinement qui est venu tout chambouler ! On est donc parti sur cette idée de peinture qui rappelait nos photos promo, ainsi que la pochette de l’album et les différents thèmes abordés.

Même si le texte du morceau peut sembler assez énigmatique, il est question de quelqu’un qui remet sa vie en perspective pour savoir qui il est. Avec ce clip, c’est un peu comme si une œuvre d’art se débarrassait de ses apparats esthétiques pour revenir à une forme de pureté. Il y avait donc une cohérence entre le fond et la forme, et ce mélange entre l’être humain et la création artistique collait parfaitement avec les sujets que nous abordons dans l’album.

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Rock Metal Mag : Est ce que vous envisagez de sortir un nouveau clip dès que la situation le permettra  ?

Jérem : Oui bien-sûr, on a déjà pas mal d’idées, et j’ai déjà écrit quelques bricoles. Je n’en parlerai pas beaucoup, mais là aussi on va essayer d’explorer des univers dans lesquels nous ne sommes pas encore allés. Cela promet encore une fois un gros travail de prépa et de tournage . Mais les tournages sont souvent de très bons moments, et on adore travailler avec Thomas. On a aussi quelques projets un peu fous et différents pour d’ici 1 ou 2 ans, mais j’en parlerai encore moins ! (rire)

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Rock Metal Mag : D’ailleurs est ca que vous arrivez à vous réunir pour répéter ou bien vous le faite chacun de votre coté?

Aaron: Nous avons pas mal répété entre les deux confinements. Il y’a même eu une résidence pour mettre en place le nouveau set, en incorporant des morceaux de Serendipity. En attendant la reprise des concerts, nous travaillons tous chacun de notre côté. Nous avons toujours fait beaucoup à la maison, les répètes ne servent qu’à travailler le set, ou à tester des mises en place, jamais à composer par exemple.

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Rock Metal Mag : Serendipity montre un Seeds Of Mary totalement atypique et qui s’est approprié sa vraie personnalité musicale. Il y a une diversité incroyable sur cet album. Comment définissez vous votre musique aujourd’hui ?

Raph : Tu sais, nous ne sommes pas très attachés aux étiquettes et nous n’avons jamais trouvé de réel intérêt à s’en accorder une plus qu’une autre. Je crois que l’on est catalogué la plupart du temps comme groupe de rock/metal alternatif.

Pour être franc, nous nous inspirons de toutes sortes de styles musicaux différents, mais aussi de films, de littérature et de toute forme d’art possible et imaginable. Je pense, en toute humilité, qu’à ce jour notre force réside dans notre faculté à mélanger toutes ces inspirations et à pouvoir passer de l’une à l’autre naturellement, sans trop d’artifices. On écrit simplement la musique que l’on aimerait entendre.

Certains nous le reprocherons peut-être, mais nous ne nous posons pas trop de questions à ce niveau là : nous sommes quelque part entre le rock et le Metal, et c’est très bien ainsi!

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Rock Metal Mag :  Malgré la paralysie musicale de cette sombre année 2020, est ce que vous arrivez quand même à vous projeter en 2021 et à envisager votre release party pour ce super album que l’on a hâte d’écouter en concert ?

Aaron : Nous avons hâte aussi !!! (rires) La release devait avoir lieu le 18 septembre 2020 à la Rock School Barbey, salle bien connue de nos compatriotes Bordelais. Elle a été repoussée, deux fois… Nous avons donc pris la décision suivante: La Release party de Serendipity aura lieu dans des conditions normales avec un public debout dans la salle prévue de base.

Si nous pouvons démarrer la tournée du dernier album avant que les conditions soient optimales pour la release, il en sera ainsi. Ce n’est pas habituel comme façon de procéder mais on est pas à ça près !

Rock Metal Mag : Merci pour vos réponses et bravo pour cet album où chaque morceau apporte sa particularité et sa force.

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